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Christophe Masutti

Affaires privées

Dans cet ouvrage, le chercheur Christophe Masutti nous plonge dans les origines historiques du "capitalisme de surveillance", ce système économique basé sur la collecte et l'exploitation des données personnelles des individus. Masutti retrace les différentes étapes qui ont permis l'émergence de ce modèle, depuis l'invention de la propriété privée jusqu'à la standardisation des langages juridiques et l'aménagement des villes. Il montre comment l'État a joué un rôle central dans la mise en place de ces infrastructures de contrôle et de surveillance. L'auteur s'intéresse également à la manière dont l'informatisation de la société a d'abord été perçue comme une menace pour la vie privée, avant que les entreprises ne s'emparent de ces technologies pour développer de nouveaux modèles économiques basés sur l'exploitation des données.

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Robert Guégan

Affaires privées
Affaires privées

book.chapter Introduction

Dès 1974, à la suite de plusieurs scandales, les États-Unis ont voté le Privacy Act : loi interdisant aux agences fédérales de constituer des bases de données sur les citoyens américains. Outre-Atlantique, la notion de vie privée (privacy) est liée au quatrième amendement de la constitution. Elle renvoie à la jurisprudence dans le cadre de la common law (qui accorde des réparations, mais ne régule pas a priori), alors que dans beaucoup d’autres pays occidentaux, la notion est ancrée dans le droit civil ou constitutionnel : la vie privée est conçue en opposition à la vie publique. Elle ne regarde pas l’État. Si la notion de privacy se développe aujourd’hui en Europe, c’est « parce que nous tendons vers une uniformisation technologique des usages de l’information, et que ces usages posent la question de la vie privée sous l’angle de la liberté du choix de divulguer ou non des informations réputées nous appartenir » (p.194). C’est un glissement vers la notion de confidentialité, où le citoyen est considéré comme un consommateur. Le débat des années 1970 prend donc une nouvelle tournure. Le Patriot Act (2001) qui met explicitement l’accent sur le renseignement pour lutter contre le terrorisme, s’attaque à la « prétendue sacralité de la privacy », secondé par les agences américaines qui multiplient les banques de données (432 en 1998, 1 100 en 2009). Au delà, nous perdons le contrôle de nos propres informations, car les technologies numériques permettent de nous pister. Elles créent un double de nous-mêmes « à partir des plus petits éléments informatifs qui émanent de nos comportements, de nos communications, et que l’on considère comme suffisants pour nous identifier et nous caractériser » (p.23). Facebook dispose ainsi de 52 000 indicateurs de profilage individuel. Un système breveté permet même de déterminer la solvabilité d’un individu en fonction de la solvabilité moyenne de son réseau. Ces procédés, qui font appel à l’intelligence artificielle, alimentent un marché de la donnée, autour de sociétés qu’un scandale met parfois en lumière, à l’image de Cambridge Analytica, qui a utilisé les données d’utilisateurs de Facebook au profit de la campagne du Brexit, par exemple. Le succès des sociétés de courtage en données repose sur une grande masse d’informations et un savoir-faire de plus en plus mathématisé. Elles peuvent désormais « désanonymiser » des fichiers, en corrélant les données avec des informations ad hoc.

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