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Afrique ambiguë de Georges Balandier fait aujourd ’hui partie des ouvrages les plus connus de la collection « Terre humaine ». Écrit dans le style du récit de voyage philosophique proche de celui de Tristes tropiques de Claude Lévi-Strauss, l’ouvrage est un témoignage scientifique sur une Afrique des colonisations finissantes assumant sa part d’autobiographie. En mêlant ses analyses au cours de sa propre existence et en restituant la vitalité de ceux qui composent cette Afrique, Balandier y analyse le dynamisme des forces en jeu, entre réinvention de la tradition et changements socio-économiques.
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MĂ©lanie PĂ©nicaud
Lorsqu’il écrit Afrique ambiguë, Georges Balandier est encore un jeune anthropologue qui a toutefois déjà fait ses preuves et publié deux thèses : Sociologie de l’Afrique noire (1955) et Sociologie des Brazzavilles noires (1955). Bien d’autres ouvrages suivront, au fil de l’élargissement des terrains et des objets d’étude de l’anthropologue : Anthropologie politique (1967), Le Tiers-monde. Sous-développement et développement (1956), Le Désordre (1988), Le Grand Système (2001), Le Grand Dérangement (2005) et d’autres encore. Afrique ambiguë est le quatrième ouvrage de la jeune collection « Terre humaine » créée par Jean Malaurie. L’esprit de l’ouvrage est d’ailleurs assez proche de celui de Tristes tropiques de Claude Lévi-Strauss, édité deux années auparavant. Georges Balandier y présente sous la forme d’une autobiographie intellectuelle le récit à la première personne de ses voyages anthropologiques et du travail de l’anthropologue sur son terrain. L’Afrique, comme l’explique l’auteur lui-même, est pour Balandier «?(sa) terre d’élection et (sa) référence?». Le récit s’ouvre sur ses souvenirs d’enfance et la carte postale venue d’Afrique de l’oncle d’un ami posant auprès de son trophée de chasse, la dépouille d’un gorille : première fascination juvénile pour une Afrique lointaine, exotique, fantasmée. Suivant les traces de l’auteur devenu anthropologue, Afrique ambiguë nous immerge ensuite rapidement dans un continent bien réel, celui des colonisations finissantes du tournant des années 1950. Afrique ambiguë a aussi la tonalité de Tristes tropiques : celle du récit d’un ethnographe en rupture avec sa propre société et de la critique d’un capitalisme colonial dévastateur. Toutefois, et contrairement à la contribution de Lévi-Strauss à « Terre humaine », Balandier dépeint l’« ambiance » coloniale qu’elle impose et analyse ses impacts sur les sociétés en présence. L’ambiguïté de cette Afrique observée par Balandier est la résultante de la colonisation d’un peuple par un autre, et des réactions de celui-ci face à la domination. Elle se niche dans tous les domaines de la vie sociale : au niveau de l’individu, comme du groupe. Elle est à la fois résistance et créativité, et affecte la vie politique, familiale, religieuse, artistique, etc. Les observateurs de l’époque s’interrogeaient pour savoir s’il fallait « voir en elles des phénomènes d’essence “réactionnaire” ou au contraire d’essence “révolutionnaire” » (p. 236).
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