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D’où viennent la méfiance et la critique envers les vaccins ? Dans leur ouvrage publié en 2019, Françoise Salvadori et Laurent Henri-Vignaud s’attachent à décrire la genèse et l’évolution des mouvements anti-vaccins depuis le XVIIIe siècle jusqu’à aujourd’hui. À l’heure de la mise au point de plusieurs nouveaux vaccins contre la pandémie de Covid-19, leurs analyses rappellent que les oppositions contemporaines réactivent des arguments vieux de plusieurs siècles de résistance à la vaccination.
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Yohann Garcia
Dans un communiqué de 2015, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) évoque pour la première fois l’expression d’« hésitation vaccinale », désignant « le fait de retarder ou de refuser une vaccination sûre malgré sa disponibilité ». En 2019, l’hésitation vaccinale est classée par l’OMS parmi les dix menaces pesant sur la santé mondiale. Contrairement à ce que l’on pourrait croire à première vue, les auteurs avancent que ce phénomène n’est pas nouveau. Il y a dans le monde une opposition, une défiance à l’égard des vaccins depuis l’origine de la vaccination. C’est bien la thèse d’une continuité dans l’histoire de la résistance à la vaccination qui est ici défendue. Alors, comment comprendre ces mouvements qui remettent en cause les vaccins ? La critique de la vaccination accompagne l’apparition des premières pratiques de contrôles des maladies infectieuses, dont l’inoculation variolique considérée comme l’ancêtre de la vaccination. Importée en Occident au début du XVIIIe siècle, cette pratique consiste à prélever des agents infectieux contenus dans le pus de personnes infectées, afin de stimuler les anticorps de sujets sains et les empêcher ainsi de contracter la variole. La pratique se diffuse rapidement dans les cercles bourgeois, puis se généralise à l’ensemble de la société. Cet âge d’or n’est pas exempt de critiques. La presse se fait l’écho des premiers échecs de la variolisation et l’on entrevoit une première série d’arguments d’ordre médicaux de la part des opposants, essentiellement dans les milieux bourgeois. L’inoculation variolique est considérée comme non naturelle, et l’on pense qu’elle contamine et mutile inutilement les corps. À partir du moment où la vaccination devient obligatoire dans la loi, les mouvements de résistance aux vaccins se structurent. Les auteurs parlent de politisation de la question vaccinale. Pour la plupart promulguées durant la première moitié du XIXe siècle, ces lois marquent une diffusion importante des thèses antivax émanant des savants, mais aussi des mouvements populaires qui forment alors une véritable « internationale antivaccin » (p. 51). Tandis que l’obligation légale entérine un déplacement de la critique sur la violation des droits fondamentaux des individus, on dénonce aussi une posture immorale des vaccinateurs et leurs intérêts économiques à vacciner. Oscillant entre nature, liberté et intérêts financiers, ces arguments constituent le fil rouge de la résistance aux vaccins et l’on en décèle encore la trace dans les critiques les plus récentes de la vaccination.
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